Hormis certains ouvrages souterrains séculaires d'adduction d'eau qui ont pu
défier le temps et que l'on redécouvre grâce aux travaux d'urbanisme (cf. aqueduc
romain de Montsouris), peu de vestiges ou même de documents parvenus jusqu'à nous nous
montrent comment s'approvisionnaient en eau nos ancêtres. On sait cependant que jusqu'à
la fin du XIXe siècle, la quasi totalité de la population de nos
contrées consommait l'eau qui provenait des puits, car bien souvent, comme ce fut le
cas à Paris, l'eau des fleuves et des rivières était difficilement
utilisable en raison des immondices qui s'y déversaient, ou bien à cause du
goût " poissonneux " inévitable, qui ne devait s'estomper qu'à la
cuisson.
C'est ainsi que, jusqu'à l'avènement des captages d'eaux potables desservant
chaque domicile, margelles et pompes à eau, qui sont en fait d'anciens puits,
pullulaient dans nos campagnes et dans nos villes.
Quelques exemples d'anciens puits retrouvés dans Paris
Un peu de géologie - notion de nappe
Quel que soit la nature géologique des terrains traversés, il existe dans le
sous-sol une quantité importante d'eau retenue par diverses couches imperméables
pouvant parfois se superposer. La première, en partant depuis la surface, retient la
nappe phréatique (ou nappe libre). C'est elle qui constitue généralement
la prolongation souterraine des cours d'eau. Il s'agit de la nappe des puits par
définition. La différence fondamentale avec l'eau des fleuves réside dans
son goût agréable dû au filtrage naturel à travers les roches qu'elle
traverse. Quant aux couches suivantes, elles retiennent diverses nappes dont certaines, parfois
profondes, peuvent être captées par les puits artésiens.
Les puits à eau de Paris
Bien avant les grandes dérivations d'eau de source de la fin du XIXe siècle qui
constituèrent l'avènement des eaux potables à domicile, existaient à
Paris et à ses portes de nombreux puits. Certes on utilisait également les eaux de
drainages provenant des collines environnantes qui arrivaient dans les fontaines, et même
l'on pompait encore parfois dans la Seine, mais depuis toujours la plupart des eaux vitales
consommées par les parisiens provenait de la nappe phréatique qu'atteignaient les
puits.
En 1833 Girard évalue entre 25 000 et 30 000 le nombre de puits à Paris et
dans ses faubourgs, qui seront annexés à la capitale 27 ans plus tard.
Dans les premiers jours du siège de Paris, Belgrand fait visiter quelque 30 000 puits ;
20 000 seront nettoyés, 54 seront nouvellement creusés et 12 seront comblés.
Si bien que le 31 décembre 1875 on comptait dans la capitale au moins 30 042 puits.
Cette approximation constituera le plus grand nombre vraisemblablement jamais atteint,
puisqu'à partir de cette date, ils tombèrent peu à peu en déclin.
Ce travail d'inventaire, toujours en cours d'élaboration, mené par la
CFPPHR fait déja état de
345 puits dans la capitale, en grande partie photographiés.
Les pompes à eau de Paris
Vers la fin du XVIe siècle apparaissent les premières pompes en fonte. Bien que
fragiles et cassantes, comme le souligne Bernard Palissy, elles sont d'un usage plus pratique
que la corde et la poulie. De ce fait, elles remplacent peu à peu les puits dans certains
quartiers où l'eau n'est pas trop profonde (Marais, Temple...). Il était en effet
difficilement possible avec ces artéfacts de l'époque de pomper une eau à
plus de dix mètres de profondeur si ce n'est par l'utilisation d'une noria.
Si les parties mécaniques de la pompe étaient en fonte, son entourage protecteur
était souvent en cuivre. Triste destin qu'allaient subir ces vestiges durant les deux
dernières guerres notamment, où le précieux métal fut
systématiquement réquisitionné.
Ainsi, il est fort rare de nos jours de pouvoir admirer une pompe ancienne en parfait
état de fonctionnement, même apparent. Car à Paris, plus qu'ailleurs, le
fait de retrouver des vestiges intacts ayant bravé l'outrage du temps relève du
véritable miracle. En effet, à ce jour aucune pompe capable de fournir de l'eau
dans Paris n'a pu être recensée.
Mentionnons toutefois pour les nostalgiques, qu'il existe une pompe publique dans le village de
Bouleurs (77) - Oubli administratif ? - qui fonctionne toujours à l'ancienne, exactement
comme ces grandes pompes à bras de Paris. Ainsi, le randonneur peut-il étancher
sa soif à ce beau puits briard, s'il ne redoute pas les nitrates et autres engrais
dissous dans la nappe.
Merci à tous ceux qui nous signaleront l'existence d'un 346e puits dans Paris. Nous
sommes également interessés par tous ceux existant en proche banlieue ou
même de toute la France, pourvu qu'il soit authentique (c'est à dire non
élaboré avec deux roues de camion cimentées).